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Les cordes du vent au Moyen-Orient

  Revue Lignes 46, Penser la paix, penser l'impossible : le conflit israélo-palestinien, Mars 2015, p 141-151

Salman Masalha || 
Les cordes du vent au Moyen-Orient

Le monde arabe a échoué à s’adapter à la modernité. Ce monde, qui a été édifié sur la récitation d’histoires puisées dans un passé glorieux, découvre avec stupéfaction en regardant autour de lui qu’il se situe désormais quelque part non loin du bas de l’échelle. Les rapports de l’ONU sur le développement humain au cours des dernières années révèlent clairement cette sombre situation. Le point de contact entre le passé imaginaire et le présent dégénéré est une source intarissable de troubles.

Moi, arabe, je voterai Meretz

Courrier International:

Pour l'intellectuel arabe israélien Salman Masalha, voter pour une liste arabe comprenant des islamistes et des ultranationalistes ne diffère en rien du vote juif pour les partis d'extrême droite israéliens..

Salman Masalha || 
Moi, arabe, je voterai Meretz 

Sexe, mensonges et téléphone arabe


Livni - Qatar

Pour leur extorquer des aveux, l’ancienne ministre israélienne Tzipi Livni aurait eu des relations intimes avec des leaders arabes: un mensonge qui a généré des dizaines d’articles enflammés dans les médias arabes.


Salman Masalha ||
Sexe, mensonges et téléphone arabe



Le racisme du rabbin Lior n’est pas de sa faute

Le rabbin Dov Lior n’a pas inventé la roue, il a simplement exhibé en public le linge sale du monothéisme.

Salman Masalha

Le racisme du rabbin Lior
n’est pas de sa faute


Tout d’abord, laissez moi dire ce qui suit: en tant que descendant d’un des enfants de Noé qui a enfreint tous les types d’interdits, je suis condamné à toutes sortes de morts étranges. Le choix offert aux personnes de mon acabit est une des trois variantes suivantes : la mort par l’épée, la mort par lapidation ou la mort par strangulation. Dans sa « Loi des Rois », Moïse Maïmonide (le Rambam) précise que pour avoir enfreint les lois noahides, je suis condamné à la mort par l’épée, sauf si j’ai des relations sexuelles avec une domestique juive qui est fiancée dans l’attente du mariage, auquel cas je devrais être exécuté par lapidation ; si par contre elle est déjà mariée, je dois alors être tué par strangulation.

Je traite de ce sujet à la lumière de la tempête consécutive à la détention pour interrogatoire par la police du rabbin récalcitrant Dov Lior, qui n’avait pas accepté de se présenter spontanément aux autorités malgré les supplications de l’institution judiciaire.

Je ne comprends pas le pourquoi de tout ce raffut. Aucun des propos racistes attribués à un rabbin ou à un autre, ou à un cheikh musulman ou à un autre, n’est une nouveauté. Quiconque s’intéresse aux lois des religions monothéistes peut facilement identifier l’origine du problème. Les monothéistes n’aiment pas seulement entrer dans les chambres à coucher des autres ; ils ne font pas que s’immiscer dans les tripes des autres dans une quête sans fin de quelque chose qui y serait entré sans autorisation ; ils ne font pas que mettre des voiles, des burkas ou des foulards sur leurs femmes pieuses, qui prient pour les enfants – les monothéistes de toutes les religions et sectes adorent verser le snag, beaucoup de sang. Il faut le dire. La vérité nue doit être dite.

Il y a quelques âmes bien intentionnées, si ce n’st très naïves, qui sont promptes à citer des versets comme « Aime ton prochain comme toi-même. » Elles tentent d’enrober la pilule amère en présentant quelque aspect positif de la religion. Mais elles oublient que « ton prochain » réfère seulement à un autre Juif. Le verset (Lévitique 19 :18) ordonne : « Tu ne devras pas exercer vengeance, ni tenir rancune envers les enfants de ton peuple, mais tu devra aimer ton prochain comme toi-même. » dans son explication de ce verset, Rambam précise qu’il s’applique à tous les membres de la Maison d’Israël qui suivent la Torah et ses commandements, et que c’est une mitzvah de haïr quiconque n’accepte pas la Torah.

Sans parler de « haviv adam shenyra b’tzealem » «(« Bien-Aimé est l’homme créé à l’image » [de Dieu]) qui est constamment cité comme preuve de l’humanité ou d’une forme d’humanisme en général et dans le judaîsme en particulier. Ici aussi, la référence concerne seulement les Juifs. Selon les sages, seuls Israël, les Juifs, sont appelés « adam » « et non les nations du monde. » Le rabbin Avraham Yizhak Hacohen Kook (« Haro’eh) ; apportant une explication convaincante à ses ouailles : « la différence entre l’âme israélienne [israélite ?], son indépendance , ses aspirations fondamentales, ses caractéristiques et ses disposition, et l’âme de toutes les autres nations, est plus grande et plus profonde que la différence entre l’âme d’un être humain et celle d’une bête. » Que pourrait-on ajouter à des sentiments aussi chaleureux ?

Tous les plus grands spécialistes de la halacha (loi juive) suivent cette conception. Par souci d’exemple, voici l’explication donnée par le rabbin Judah Loew ben Bezalel (le Maharal) : « La perfection de la création, en ce qu’elle a trait à l’humain en particulier, s’applique à Israël et pas aux nations. » Il ajoutait que l’écart entre Israël et les autres nations est comparable à celui entre l’être humain et les animaux dépourvus de parole.

Si tel est le cas, alors pourquoi tant de politiciens et de défenseurs autoproclamés du droit cherchent-ils les bonnes grâces du respecté rabbin du mouvement nationaliste religieux ? Le rabbin « éclairé » n’a pas inventé la roue, après tout. Il a simplement étendu en public le linge sale monothéiste. Les politiciens populistes ont étalé leurs vêtements crasseux dans leurs apparitions médiatiques à chaque fois que l’occasion s’en présentait, et à leurs yeux, le rabbin est coupable de calomnie [envers la religion juive].

Il faut le dire, clairement et sans équivoque: la souillure morale réside dans les enseignements obscurantistes du monothéisme. Tant que tout un chacun, sous prétexte de culture, ne le reconnaîtra pas, dans cette région et à travers le monde, il n’y aura pas de lumière au bout du tunnel.
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Haaretz, 4 juillet 2011
traduit de l’anglais par Djazaïri
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Les Etats-Unis ne sont pas intéressés par la paix au Moyen Orient

L'administration américaine veut la région en flammes pour pouvoir la contrôler
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Salman Masalha

Les Etats-Unis ne sont pas intéressés
par la paix au Moyen Orient

On doit le dire explicitement: les Etats-Unis ne sont pas intéressés par obtenir la paix au Moyen Orient. La paix dans la région n'est pas une priorité majeure pour eux, et n'a jamais correspondu à leurs intérêts. Cela peut paraître surprenant pour quelqu'un qui ne sent pas l'ambiance qui prévaut dans cette région.

Quiconque pense que la chaîne arabe de télévision al Jazeera est le porte parole de l'Islam radical et met en danger les intérêts américains est invité à rafraîchir sa mémoire et mettre à jour son imagination. Parce que l'Islam radical a été encouragé par les diverses administrations américaines.

On doit répondre à une seule question: comment cette chaîne populiste a été hébergée par le minuscule émirat du Qatar et pas ailleurs ? On sait que la plus grande base aérienne des Etats-Unis au Moyen Orient se trouve au Qatar. Wikileaks a révélé que c'est de là que partent les missions de bombardement de l'Irak et de l'Afghanistan et le Qatar a offert son territoire comme base d'attaque de l'Iran, a exprimé son souhait de prendre part à un éventuel conflit contre l'Iran, et offrant de prendre en charge tous les coûts de la base.

De plus dans un entretien avec le sénateur John Kerry, début 2010, l'émir sheikh al Thani a même exprimé sa compréhension de la position d'Israël et des sentiments israéliens, le peuple d'Israël ne pouvant être blâmé de ne pas faire confiance aux Arabes, ayant vécu sous la menace arabe si longtemps. De même Shimon Peres, Tsipi Livni et d'autres dirigeants israéliens ont été royalement reçus (1).

Ces visites et les relations avec Israël n'ont jamais été rapportées par al Jazeera. En même temps, cette chaîne continue de dénoncer d'autres régimes arabes pour leurs relations avec Israël. Bizarre? Pas nécessairement.

Toutes les vidéos de Ben Laden sont diffusées par al Jazeera. Car la chaîne a un rôle précis: déstabiliser les régimes arabes et créer une situation de chaos, ce qui est exactement l'objectif des Américains qui veulent cette région en flammes pour la contrôler.

Les flammes du Moyen Orient servent les intérêts de l'économie américaine. Il suffit de mentionner le contrat de fournitures d'armes à l'Arabie pour 60 milliards $, le plus gros contrat de l'histoire militaire. Ceci permettra de créer des milliers d'emplois.

La tension continue au Moyen Orient alimente l'industrie de la guerre et crée des emplois. D'où l'intérêt américain d'enflammer les passions – à travers al Jazeera par exemple – et de miner les régimes arabes, dont l'existence dépend du soutien américain. La fourniture d'armes pour les soutenir et les conflits sont surtout mus par la nécessité de survie des industries américaines.

Ainsi c'est la raison pour laquelle la Maison Blanche ne fait aucun effort sérieux pour promouvoir la paix entre Israël et ses voisins. Al Jazeera est un outil entre les mains des pyromanes.

Voilà la doctrine américaine en bref. Le problème c'est que ce "golem" peut se retourner contre son inventeur et nous assistons au déroulement de cet épisode.
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Haarets du 10 février 2011

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Comment le sionisme européen a corrompu les ‘Juifs Arabes’

La décision de Carmel Shama d’ajouter un appendice à son nom est un exemple flagrant de la manière dont le ‘sionisme ashkénaze’, venu d’Europe, a corrompu les esprits des Juifs ‘Mizrahi’.

Salman Masalha

Comment le sionisme européen
a corrompu les ‘Juifs Arabes’

Carmel Shama en avait marre, alors ce parlementaire a décidé qu’il était temps de renouer avec ses racines ethniques. Pour répondre à toutes les confusions autour de son identité, il a demandé au ministère de l’intérieur l’ajout d’un appendice à son patronyme afin de devenir officiellement le député «Shama-Hacohen.»

Beaucoup de gens le prenaient par erreur pur un Druze. En fait, alors qu’il visitait Auschwitz, des députés l’avaient complimenté pour sa manifestation de «solidarité avec le peuple juif.» On lui a aussi fréquemment demandé de donner son avis sur des « affaires arabes en tant que membre de cette communauté.» Apparemment, c’était un peu trop à gérer pour lui.

C’est là un exemple flagrant de la manière dont le «sionisme ashkénaze» européen a corrompu les esprits de ceux qu’on qualifie de « membres du groupe Mizrahi,» originaires d’Afrique du Nord et du Moyen Orient.

Il convient de signaler que la raison première pour laquelle les Israéliens devaient mentionner leurs identités nationales ethno-religieuses sur les documents officiels était de permettre aux institutions ashkénazes de distinguer entre Juifs et Arabes, dès lors que de nombreux Juifs venaient de pays arabes et avaient des noms arabes. Au début, seules deux catégories apparaissaient : Juifs et Arabes. Dans une étape ultérieure, «Druze» sera ajouté comme catégorie distincte.

Comme le ministre de l’intérieur Eli Yishal a refuse d’appliquer un arrêt de la Haute Cour décidant d’inclure les Israéliens qui se sont convertis auprès du judaïsme réformé dans la catégorie des Juifs, la mention de la nationalité n’apparaît plus ces dernières années que comme une série d’astérisques sur les cartes d’identité. Mais d’autres marqueurs identitaires qui distinguent entre «Juifs» et Arabes subsistent.

Prenez, par exemple, un nom comme «Yosef Hadad» En se basant seulement sur le nom, il est impossible de savoir si celui qui porte ce nom est un Arabe ou un Juif. Des policiers entraînés, par contre, peuvent situer immédiatement la différence. Pour promouvoir l’objectif «digne d’intérêt» de séparer citoyens Juifs et Arabes, des officiels du ministère de l’intérieur ont voulu supprimer l’obligation de noter le nom du «grand père Juif.» En supposant donc que ce Yosef Hadad est Juif, le nom de son grand-père ne figurera pas sur sa carte d’identité. Mais s’il est Arabe, le nom de son grand père sera affiché fièrement. N’est-ce pas une assez élégante forme d’apartheid dans l’identification ?

Les années passant, les tensions nationalités ont incité de nombreux «Juifs Arabes» à essayer de s’éloigner de leur identité ethnique. Mais comment le pourraient-ils alors que leur apparence, leurs goûts musicaux et alimentaires et leurs styles de vie sont si proches du milieu culturel d’où ils sont venus ?

La seule manière pour eux de consommer la rupture a été d’adopter des signes ostensibles de l’identité religieuse juive, les kipas et les étoiles de David autour du cou en premier lieu. En fait, la mesure dans laquelle des étoiles de David pendent à leurs cous et des kipas couvrent leurs têtes, correspond directement à leur niveau de déni de leur appartenance ethno-religieuse arabe. L’expression la plus grotesque d’un tel déni, ce sont les chapeaux et les vêtements hassidiques portés par les membres du Shas.

Pour le dire autrement, un chapeau brûle sur la tête de chaque négateur de soi.

La séparation ethnique a été, et reste bien vivante chez les citoyens de ce pays. Le député Shama-Hacohen peut estimer s’en tirer à bon compte. Nous pouvons même profiter de l’occasion pour lui faire cadeau de deus députés Druzes, les députés Ayoob Kara (Likoud) et Hamad Amar (Yisrael Beiteinu) – qui à eux deux semblent encore plus extrémistes qu’Avigdor Lieberman et le rabbin Eliezer Sach pris ensemble. En fait, s’ils mettaient «Hacohen» à côte de leurs patronymes, ils feraient d’une pierre deux coups : premièrement, ils ne feraient plus honte aux Druzes ; deuxièmement, leur changement de nom rendrait fou le député Shama-Cohen.
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Haaretz 14 novembre 2010, traduit de l’anglais par Djazaïri

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L’honneur sacré des Arabes

Salman Masalha


L’honneur sacré des Arabes


Samedi 7 Février 2010, une manifestation contre la violence envers les femmes dans la société arabe a eu lieu à Nazareth, à l’initiative du Comité de la Haute surveillance Arabe.

Ce n’est pas tous les jours que les femmes arabes gagnent du renfort venant de tout le spectre de la politique arabe en Israël. L’encre sur les affiches réalisées dans le cortège était à peine sèche, lorsque les rapports publient qu’une autre femme a été tuée.

Certains disent que les « crimes d’honneur de la famille » dans la société arabe sont une autre variante de la violence envers les femmes. Toutefois, il est impossible d’ignorer le fait que tandis que dans d’autres sociétés les meurtriers sont les maris ou même les amants qui commettent les assassinats dans un contexte bêtement appelé « romantique », dans la société arabe ces crimes sont commis par des frères, des pères ainsi que des cousins. Les intellectuels arabes qui se détournent de la responsabilité en égalant les deux phénomènes, tombent dans le piège qui les situent dans un coin sombre : stipulant une équivalence entre les deux phénomènes qui oblige à expliquer ce qui est « romantique » dans l’assassinat d’une femme par son frère, son père ou certains de ses autres parents mâles.

Afin de comprendre l’origine du problème, il suffit de lire un article de Cheikh Kamal Khatib, chef adjoint du Mouvement islamique en Israël, écrit en janvier 2007. Cet article s’inspire de la norme qui prévaut à de nombreux niveaux de la société arabe, dans toutes les communautés (musulmanes, druzes et même chrétiennes à un degré moindre). Khatib s’en prends violemment à la demande de défense des droits de la femme et le compare à des complots colonialistes.

Les remarques de Khatib interviennent en réponse à un article écrit par l’avocate Samar Khamis du centre juridique Adalah pour les droits des minorités en Israël. Elle parle de l’oppression de la femme arabe et donne comme exemple les mariages forcés et la sanctification de la virginité. « L’appel à la révocation du caractère sacré de la virginité », écrit Khatib, « équivaut aux coups de poignards et attaque grossièrement notre religion, notre morale et notre saint des saints nationaux. » Ce qui irrite Khatib plus que tout, c’est l’existence de l’Aswat (voix) de l’Organisation des femmes arabes gay : « Quels services ces femmes apportent-elles en dehors de la corruption, de la destruction et de l’abandon de la moralité, de l’image et de l’identité de notre peuple ? », questionne Khatib dans son article.

La perception que tous les fardeaux de « l’honneur arabe » reposent sur les épaules des femmes tire sa force de la structure tribale, qui est le principal obstacle au développement de la société. Les racines du problème résident, d’une part, en l’absence totale de compréhension de l’essence de la masculinité, et d’autre part, dans le fait que les hommes arabes vivent dans un état d’oppression religieuse, sociale et politique. L’homme arabe abattu a grandi dans une structure tribale oppressive dans laquelle il cherche le maillon le plus faible afin de le battre, de l’étouffer et même de l’assassiner. De cette façon, il soulage sa frustration en déchargeant son « honneur personnel perdu » sur les épaules de la femme.

Le sens profond de cette nouvelle perspective est que c’est l’homme arabe lui-même et personne d’autre qui se prive de son honneur personnel. Comme il est, par ailleurs, privé de son honneur social, culturel et politique, d’une manière détournée et aussi lâche, il trouve un substitut pour démontrer son honneur masculin. Il s’agit d’une façon extrêmement basse de démontrer sa supériorité envers la femme arabe.

Afin d’apporter un changement, il faut une révolution de consciences, dont le but sera de libérer l’homme arabe de l’oppression dans laquelle il est plongé. L’éducation, tant à la maison qu’à l’école, doit transmettre la perception que l’honneur découle de l’individu lui-même. L’honneur personnel de l’individu est exclusivement lié au propre de l’individu et aucune autre personne n’a rien à voir avec cet honneur. C’est cette perception déformée de l’honneur masculin qui détruit la société arabe et ces questions nécessitent une discussion approfondie et courageuse.

J’ai eu l’honneur de compter parmi mes meilleurs amis des lesbiennes arabes. Je peux dire que la contribution que ces femmes apportent à la société est beaucoup plus grande que celle de beaucoup d’hommes arabes, dont l’ensemble de la masculinité se résume à rehausser leur poitrine et faire pousser leur moustache.

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Traduit par Sérine Akar

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Cœurs et diamants



Salman Masalha ||


Cœurs et diamants

En cette fin d’été, les sons dissonants se mêlent dans l’air. Au cours de ce mois de Ramadan qui vient de frapper à la porte de la ville, les voix non synchronisées des muezzins déchirent le ciel. Chaque voix, avec son timbre propre, jaillit des magnétophones enclenchés dans les minarets des mosquées diffusant dans la ville arabe. En entendant ces voix, tout à coup, les cloches des églises se mettent à sonner dans une farandole de notes qui monte et monte et puis s’estompe pour laisser la place à d’autres sons provenant de la nature, qui tentent, à leur manière, de s’intégrer à la symphonie inachevée de la ville.

Les pommes de pin, semblables à des chauves-souris pendues aux branches des arbres, ont commencé à éclater, de rire sans doute, cette fois, après avoir entendu les bruits étranges portés par l’air chaud. Personne ne doit faire de mal aux chauves-souris ; parce que, selon la légende, elles ont contribué jadis à éteindre un feu dans la ville. Quand les flammes avaient envahi le Temple, elles avaient volé jusqu’à la mer pour rapporter de l’eau. Et comme si le rire des chauves-souris crépitant dans les arbres ne suffisait pas, le vrombissement des bulldozers entre en action : les machines qui creusent émettent alors un bruit métallique en frappant contre le rocher dans un vacarme assourdissant.

Je cherche le roi Salomon. C’est lui qui dira aux génies de me sauver de la punition que m’infligent les bulldozers. Car, suivant la tradition arabe, il avait employé des génies dans la construction de la ville et du Temple. Mais les tavaux perturbèrent tellement le repos des habitants qu’ils descendirent dans la rue manifester leur colère.

Salomon convoqua alors ses vizirs et ses génies. A ces derniers, il dit : «Quelle sorte de génies êtes-vous? N’y a-t-il pas une manière de creuser la roche, sans ce bruit assourdissant ?»
«Un seul génie peut le faire», répondit l’un des génies. «Son nom est Sakhr (rocher) et il vit loin, très loin d’ici, dans une mer lointaine». Salomon ordonna immédiatement qu’on lui amenât ce Sakhr.

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Clameur et tumulte ! J’en avais été déjà submergé lors de ma première visite dans ces lieux. Le roi Salomon ne vit plus ici, me suis-je dis, et personne ne pourra faire baisser le niveau sonore. Personne ne mettra un terme au découpage de la pierre par la scie.
Non loin d’ici, sur une colline surplombant la vieille ville, un drapeau bleu et blanc claque au vent. Non, ce n’est pas celui que vous pensez, il s’agit d’un autre drapeau qui vient de loin, de l’au delà des mers. Robert Bruce, le roi d’Ecosse, voulait se rendre à Jérusalem, mais n’ayant pu réaliser son rêve, il ordonna qu’après sa mort, son coeur fût enterré là-bas. Ainsi, lorsqu’il décéda, son chevalier, Douglas Black, plaça son cœur dans un coffret en argent et l’emporta avec lui.

En Espagne, lors d’un combat contre les Sarrasins, ce Douglas jeta le coffret sur le champ de bataille et dit: « Va d’abord, cœur vaillant, au combat, comme tu en avais l’habitude et Douglas te suivra». Le coffret fut retrouvé ensuite, transpercé par des lances. De retour en Ecosse, le cœur de Bruce fut enterré dans une église d’Edimbourg.
Les soldats écossais venus à Jérusalem avec les forces britanniques durant la Première Guerre mondiale n'avaient pas oublié leur roi et son testament. Ils fondèrent l’Église d’Ecosse, ici sur la colline, en souvenir de Bruce, au «cœur vaillant».

***

Tout le long de sa vie, Jérusalem a connu le sang et la sueur. Elle a accueilli d’innombrables étrangers. De bien étranges étrangers à vrai dire !

Dans cette ville, l’étrangeté est différente de celle d’autres villes. Ici, elle est l’essence de la poésie. De toujours, Jérusalem a été (il serait plus correct de dire : sera toujours) une attraction pour une multitude d’illuminés. Toute sorte de pérégrins rêveurs et fous – depuis les rois jusqu’aux plus humbles, issus de toutes nations, religions et couleurs – y ont afflué. A la différence des autres villes dans le monde, son nom est associé à un dérangement mental, attesté par d’éminents médecins : «le syndrome de Jérusalem». Il se manifeste chez ceux qui, parvenus aux portes de la ville, se croient dotés soudain de pouvoirs prophétiques, les autorisant à annoncer la fin des jous. Pourtant, les jours s’écoulent, et on n’en voit pas la fin.

Il se trouve que je suis entré aussi par les portes de la ville comme un étranger ; c’était dans les années 1960, et je n’avais pas encore l’esprit dérangé. La Jérusalem de l’époque me semblait un lieu magique. Mais tout ce dont je me souviens est une terrasse donnant sur la porte de Damas et la Vieille Ville. Jérusalem n’avait pas encore été «réunifiée », comme le cliché hébreu le clama après la guerre de juin, 1967. Le nom hébreu de cette guerre, la guerre des Six Jours, est tiré du récit de la création dans la Genèse. En arabe, un terme a été spécialement inventé pour évoquer la défaite des armées arabes: la Naksa. Désormais, la Naksa désigne à la fois une inclinaison de la tête et une retraite temporaire avant le grand renouveau arabe. Et on fera comme si la tête arabe ne s’était jamais inclinée vers le bas. Pourtant, cette Naksa dure depuis plus de quatre décennies.

Je venais alors de la lointaine Galilée dans le cadre d’un voyage scolaire. Des murs de barbelés séparaient l’est de l’ouest. L’est du pays était gouverné par le Royaume hachémite de Jordanie. L’est était alors si proche, si éloigné !

Et puis un jour d’été, une décennie plus tard, je me retrouvai assis dans un café du centre ville. Maintenant comme auparavant, des gens de toute couleur et parlant toutes les langues vaquent à leurs affaires quand soudain, un cri rythmé se fait entendre : «La Terre Sainte, pécheurs et fils de putes ...» L’homme et la voix font leur chemin dans la foule, et disparaissent. Seuls les échos de sa voix restent derrière. Gravés, ici et là, dans les sourires des passants.

Au cours de ces années, j’ai assisté au changement d’aspect de la ville. Des collines furent excavées, un mur et des tours surgirent à l’horizon, de nouvelles murailless cernèrent de près la ville et le cœur de ses habitants. Non loin de ce café, on continue de creuser encore et encore. On construit l’infrastructure d’un train léger sur rail ; du moins c’est ce qu’ils disent. Ce ne sera donc point un chemin vers les cœurs, mais la voie d’un train qui va traverser maladroitement la ville, un train qui viendra de nulle part et ira nulle part, pétendant unir l’Orient et l’Occident. Mais cette ville n’a ni orient ni occident…

***

Lorsque Salomon ordonna à ses génies de lui amener Sakhr, ils lui dirent que c’était là une mission très difficile. Ils expliquèrent que Sakhr était doué d’une force extraordinaire et qu’il n’y avait qu’une seule façon de l’attraper: une fois par mois, Sakhr venait sur une île pour boire tout son saoul d’eau. Il fallait donc assécher la source et remplacer son eau par du vin. Ainsi quand il aura tout bu, il sera ivre et perdra ses forces. Salomon répondit que peu lui importait la manière de l’amener.

La ville de Jérusalem est bâtie sur des légendes. Pour conforter la légitimité de l’islam, Muhammad s’envola de Médine à Jérusalem monté sur la jument al-Buraq, le même cheval ailé qui avait appartenu au roi Salomon, comme le soutient la tradition musulmane. A l’inverse, la tradition juive n’a pas autorisé Moïse à entrer dans la terre promise et dans cette ville parce qu’il avait choisi de frapper un rocher plutôt que de le raisonner.
Je grimpe au sommet d’une autre colline, dans le voisinage du quartier d’Abou Tor, et je contemple la vieille ville et le désert de l’autre côté de la rivière. Je lève les yeux au ciel, en essayant d’imaginer le cercueil d’Aaron, tel que les Enfants d’Israël le virent décrire des cercles dans le ciel.

Cette colline où je me tiens est le Tur Haroun, la colline d’Aaron. La légende rapporte que, lorsque les enfants d’Israël adorèrent le veau d’or, Moïse voulut venir ici parler à son Dieu. Son frère, Aaron se proposa de l’accompagner, et Moïse dut accepter bien malgré lui. Sur le chemin, ils aperçurent deux hommes qui creusaient une tombe, et ils leur demandèrent : « À qui est cette tombe ?»

Les fossoyeurs répondirent : «Cette tombe est destinée à un homme exactement de cette taille», et ils indiquèrent Aaron. Puis ils lui dirent : « Pour l’amour de Dieu, couchez-vous dans cette tombe afin que nous puissions la mesurer».

Aaron enleva ses vêtements et s’allongea. À cet instant précis, Dieu prit l’âme d’Aaron et la tombe se referma sur lui. Moïse rassembla les vêtements d’Aaron et fit demi tour. Le voyant retourner seul, les enfants d’Israël l’accusèrent d’avoir tué son frère. Et comme il était incapable d’expliquer la disparition de son frère, Moïse appela son Dieu. Qui répondit à ses prières en montrant aux enfants d’Israël la tombe d’Aaron, virevoltant dans le ciel au-dessus de cette colline, Tur Haroun.


***

Les génies se mirent en route, comme Salomon le leur avait ordonné. Ils se rendirent à la source et remplacèrent l’eau par du vin, puis ils se mirent en embuscade. Plusieurs jours s’écoulèrent, et Sakhr n’apparaissait pas. Alors, ils songèrent à partir, mais tout d’un coup, le génie Sakhr surgit de nulle part, marchant doucement vers la source. À sa grande surprise, il vit du vin couler de la source et après avoir hésité, il partit sans avoir étanché sa soif. Les jours suivant, Sakhr retourna régulièrement à la source mais sans y boire, puis il finit par céder et but jusqu’à étancher sa soif et tomber, ivre comme Lot. Les génies qui l’épiaient se jetèrent sur lui, l’attachèrent et l’emmenèrent à la cour de Salomon.

Quand Salomon lui eut dit les raisons de sa séquestration, Sakhr dit : «Vous devez apporter ici un nid d’aigle entier avec ses œufs». A la demande de Salomon un nid fut trouvé et placé dans le désert au sommet d’une montagne, et ordre fut donné de l’entourer de parois de verre blindé transparent.

Quand l’aigle retourna chez lui, il ne trouva ni le nid, ni les oeufs. Il s’envola dans le ciel et fit des cercles en altitude jusqu’à ce qu’il aperçut le nid. Il vint se poser dessus, et essaya de picorer le verre avec son bec et de le gratter avec ses griffes. En vain. Désespéré, il s’envola.

Le lendemain, il revint avec une pierre samur dans son bec. Il décrivit des cercles au-dessus du nid et laissa tomber le samur qui brisa la cloche de verre. L’Aigle ramassa alors le nid et partit. Sakhr se rendit sur le site, trouva la pierre et l’apporta à Salomon.


***

Jérusalem est entourée de collines. Parmi celles-ci, il y en a une où se trouve une grotte semblable à une maison. Dans un passé lointain, les gens venaient la visiter. Quand la nuit tombait sur la colline, la grotte s’éclairait d’une lueur rougeoyante, sans qu’il y eût à l’intérieur lanternes, lampes, ou bougies.

Depuis que j’ai lu cette légende, j’erre dans les collines de Jérusalem à la recherche de la grotte illuminée. Je viens tout juste de la trouver. Mais je garde secret son emplacement et je m’y rends de temps en temps tout seul. Tout au fond de la grotte, coulent dans toutes les directions de minces filets d’un liquide mousseux couleur de vin. A cause de tout ce bruit alentours, j’ai pris ma décision : à ma prochaine visite, j’étancherai ma soif avec ce liquide rouge sans m’inquiéter de perdre mes forces.

***

Salomon, qui connaissait le langage des animaux, ordonna à ses génies de lui amener l’Aigle. Quand celui-ci fut devant lui, il l’interrogea sur l’origine de la pierre samur. L’aigle lui indiqua une très haute montagne, tout à l’ouest.

Salomon ordonna alors à ses génies de s’y rendre avec l’Aigle et de lui rapporter de cette pierre spéciale. Les génies y allèrent et en rapportèrent autant qu’ils pouvaient en soulever. Certains disent que le samur est le diamant, avec lequel les génies excavèrent et taillèrent par la suite les pierres de Jérusalem, sans faire de bruit et sans déranger la tranquillité des habitants.

Le roi Salomon ne vit plus ici, me suis-je dit, et le vacarme des bulldozers remplit l’air de la ville et ne me laisse aucun repos. Pour me distraire de cette nuisance, je me lève, me verse un verre de vin et allume une cigarette. Puis je place le verre sur le rebord de la fenêtre et contemple les larmes rouges couler sur la face interne du verre transparent, glisser sur les parois comme de la rosée de diamants se mélangeant graduellement avec la lueur rouge du soleil couchant au-dessus de la Vieille Ville.


Jérusalem, Août-Septembre 2009

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Publié en: Qantara, n° 73, Institut du monde arabe, Paris 2009

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Images



Salman Masalha ||


Images

La rue pavée d'illusions comme un rêve autorisé
ceux qui s'endorment sur le lit de leur honte
ceux qui veillent la nuit sur un trottoir à peine toléré
ceux qui se lamentent sur leur sort
et ceux a la recherche du succès
ceux qui dans la poitrine taisent leur prière
et ceux qui traversent avec les vents
La barque oubliée sur le fleuve en plein jour
Images d'exils que la nuit a largué
sur mon chemin avant de disparaître
Ô Nuit qui a oublié la rosée dans mon cœur
emmène moi dans un pays que la mort enveloppe
mon corps n'est que lamentations.



Traduit par Samira Negrouche

***

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La fillette de Gaza


Salman Masalha


La fillette de Gaza

Avec les plumes de la mer
La fillette de Gaza confectionne des nids.
L'homme qui derrière la muraille se tient debout
Abrite sous son regard
Un collier de souvenirs.
Après avoir traversé la rue,
Les légendes, dans les nids,
Eclosent comme des oeufs
Des enfants courent se blottir
Dans la couleur du temps
Ils recueillent la voix timide
Des sables du désert
Le soir venu, les larmes se dispersent
Et mouillent la route de la mer
La nuit sourit à l'exil
Le poète rend son dernier soupir.

***

Traduit par A. K. El Janabi, Poésie 1, no. 27, 2001
________


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Le Poème


Salman Masalha


Le Poème

Rendez les nuées au fleuve
Effacez de l'enfant
La marque foncée de la grossesse
Verdoyantes, les feuilles du chagrin s'étalent
Et les légends enchevêtrées
Nourrissent les tétins de veuves
Ne vous attristez pas
Sur ce qui est perdu
Et surtout ne, ne dites pas
Que l'espoir
Est dans le poème
Si les prophetes viennent a disparaitre.


Traduit par A. K. El Janabi et Mona Huerta
***

Published in:
Le poème arabe moderne,
établie et présentée par Abdul Kader El Jababi, Préface de Bernard Noël, Maisonneuve & Larose.

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Noir, Mais Vert

Salman Masalha

NOIR, MAIS VERT

Pour écrire des poèmes,
vaniteuses veritées, pas besoin
d’aller très loin. Car
les racines du bon poème
germent toujours
profond.

Ceux qui veulent puiser
des poèmes de la terre
et aussi un bon câdeau
pour offrir
ne doivent que penser
noir,
mais
vert.


Traduit par Noga Tarnopolsky

Maison

Salman Masalha

Maison

Lorsque je m'allonge sur
la terre déserte portant
tes visions d'amour
dissimulées dans les ténèbres du doute,
verrai-je le passé
s'écoulant comme une rosée entre
mes paupières? Verrai-je l'avenir
comme une lumière déjà vue
dans l'abysse? Des existences
tournoyantes, infiltrées dans mon âme,
pour que personne hormis moi ne les voie,
elles, qui inondaient mes yeux?
Lorsque je m'allonge sur le dos
sans rien pour me protéger de
mes détresses, je ne verrai au-dessus de moi
que la nuit que tu as fait glisser sur ma vie,
que des fragments d'une terre d’origine
où je ne suis pas. Si j’arrive
à construire la maison de nos amours,
veille sur elle
et sois.


Traduits par Nadine Srouji
  • Italian

    Quale luce in fondo al tunnel

    Tranquilli. Ciò che è accaduto in Tunisia non è destinato a ripetersi tanto presto in altri stati arabi. Il rovesciamento di un dittatore ad opera di una rivolta popolare porta effettivamente una ventata di aria fresca, e forse persino un raggio di speranza a tanti, in questa parte del mondo.



  • Malay

    Isyarat Selamat

    Sekian lama Amir tidak pernah ketawa sekeras itu, dan sudah tentulah selama ini dia tidak pernah tertawa sebegitu pada ketika mendengar satu pengumuman dari Komander Dalam Negeri.


  • Neither Arab nor Spring

    The vicissitudes that have, for some reason, been collectively dubbed the "Arab Spring" are neither Arab nor Spring. One can say that they are actually living proof of the identity crisis and reverberating bankruptcy of Arab nationalism.

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  • Spanish

    Una lógica sólo para judíos

    El Profesor Shlomo Avineri hace preguntas difíciles, desea discutirlas y agrega: “Cualquiera que apoya como yo una solución de dos Estados para dos pueblos y desea ver a los ciudadanos árabes de Israel ganando plenos derechos igualitarios puede, e incluso debe formularlas”


    Italian

    L’Oriente che vive nel passato

    A differenza della nostra regione, gli Stati Uniti sono una superpotenza con una breve storia: che è una delle fonti della sua forza. Nei luoghi dove c’è tanto passato, come il Medio Oriente, è difficile vedere il futuro.
  • Italian

    Stormi di uccelli fino a Roma

    Alla fine degli anni 50 ero un bambino, ingenuo e innocente. La mia piccola mente di arabo non era mai stata attraversata dall'idea di quali fossero le misteriose intenzioni degli stormi di uccelli che si posavano, vicino alla raccolta delle olive, sugli uliveti del villaggio di Al-Maghar, sul mare di Galilea

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    German

    Wie geht es weiter?

    Es mag schwierig erscheinen, nach dem Gaza-Krieg über Frieden zu sprechen. Aber es ist Zeit, sich mit den wesentlichen Streitpunkten auseinanderzusetzen, die eine Verständigung zwischen Palästinensern und Israelis verhindern. Israelis müssen zuerst an Israelis denken, nicht an Juden.


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  • French

    L’honneur sacré des Arabes

    Ce n’est pas tous les jours que les femmes arabes gagnent du renfort venant de tout le spectre de la politique arabe en Israël. L’encre sur les affiches réalisées dans le cortège était à peine sèche, lorsque les rapports publient qu’une autre femme a été tuée.


  • Turkish

    Öncelikle konu İran olduğunda Başbakan Benjamin Netanyahu’nun haklı olduğu anlaşılmalıdır. Ayetullah’ların yönetimi devralmasından beri İranlı liderler İsrail hakkında konuşmaktan bıkmamıştır.


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